dimanche 23 octobre 2016

"Nos misérables croyances en aérologie"


Je fais référence à la publication vu dans le Parapente Mag du mois d'Août - Septembre 2016.
J'ai noté et commenté plus bas quelques extraits du texte.
C'est un article page 8 ; je n'ai pas mis la photo de la page car droits d'auteurs.

Les extraits :

"Cette édition nous aura révélé une vérité insoupçonnable... Tout le monde pense que dans les Pyrénées, on ne doit jamais voler sous le vent de sud (...) on nous a mis des diables dans la tête, or les jeunes, eux, ne s’embarrassent gère de ces diables, ils les jettent aux oublis."

"Ce matin là au décollage de Superbagnères, les aiguilles des ventimètres mesuraient plus de 50 Km/h de vent fortement rafaleux du Sud-Ouest. Ça ronflait fort pendant 20 minutes, puis il y avait un tout petit créneau de 2 ou 3 minutes avec seulement 20 Km/h de vent (...) Il observe les cycles monstrueux durant une bonne heure puis, dans un des courts créneaux, il se lance. Gonflage face au vent, ascenseur vertical, voile chahutée au-dessus du déco et demi tour, feu vent arrière dans le flux du vent et des grosses rafales qui reviennent."

"Son audace fait tilt : quelques autres qui pourtant étaient bien décidés à redescendre à pieds, reviennent, ressortent leur voile du sac et tentent aussi le coup. Neuf pilotes oseront ainsi profiter des courts créneaux d'accalmie."

"Nous n'avions jamais vu cela, à part à la x-alps ! De quoi faire vaciller nos misérables croyances en aérologie."


Mes commentaires :

Lire ce texte m'a choqué et déçu. Je trouve cet article limite criminel et surtout d'une profonde bêtise.
Criminel car c'est faire croire que voler sous le vent de sud ne présente plus de dangers ; c'est banaliser un danger réel.
Et d'une bêtise immense car nous avons aujourd'hui une telle connaissance de la météo et des risques liés au sud dans les Pyrénées pour savoir à quel point ces phénomènes météo peuvent être vicieux et surprenants.
Bien évidement la force du flux est à prendre en compte, un léger flux de sud ne pose aucun souci. 
Mais qui n'a jamais vécu ou vu des phénomènes liés au vent de sud dans les Pyrénées les surprendre ? 
Ce texte c'est une ode à la sélection naturelle ! Seuls les plus fort et aussi surtout les plus chanceux, ne l'oublions pas, seront là pour prouver qu'on pouvait le faire ! Cool !

Et puis on pourrait aussi discuter sur la notion de mimétisme quand on lit ce passage : "Son audace fait tilt : quelques autres qui pourtant étaient bien décidés à redescendre à pieds, reviennent, ressortent leur voile du sac et tentent aussi le coup".
Mais c'est un autre débat, et qui concerne aussi la compétition, la CFD... 

Je ne m'explique vraiment pas l’intérêt d'un tel texte. C'est même pour moi perçu comme une certaine forme de provocation. Mais au final je ne sais pas qui est visé ? Les vieux pilotes toujours en vie par excès de prudence ? Les jeunes pilotes qui réfléchissent avant de voler ? Et si l'enjeu n'était pas la vie, on pourrait en sourire et passer à autre chose. Mais ce n'est malheureusement pas le cas.

Autre aspect ; je ne m'explique pas que l'auteur ne mesure pas le rôle formateur, d'exemple, qu'il joue, qu'on joue, avec nos publications, nos déclarations de vol, auprès d'un grand nombre.
Il y a quelques années j'avais été interpellé, et à juste titre, après avoir publié un post sur ce blog après un cross réalisé dans les Pyrénées un jour où un flux de sud se mettait en place. Longtemps je me suis posé la question de savoir quoi publier, avec toujours le risque d'induire en erreur les lecteurs et de leur faire prendre un risque de façon involontaire.
A chaque fois que je publie le récit d'un vol réalisé dans des conditions atypiques (vent soutenu, thermiques puissants, etc...), je communique que le vol a été effectué dans des conditions nécessitant une parfaite maîtrise de son matériel et présentant un certain niveau d'engagement.
 Aujourd'hui encore je me pose la question à chacun de mes posts. Par contre à aucun moment je n'ai fait la promotion d'une pratique à risque en expliquant que c'était la voie à suivre et que le reste n'était que balivernes.
Là, dans cet article, c'est ce que je reproche. Qu'on parle de la maîtrise des pilotes fort talentueux, pas de soucis, qu'on mette en avant leur exploit, bravo, mais qu'on prenne cette pratique comme étendard c'est pathétique. Surtout en stigmatisant à contrario ceux qui ont de "misérables croyances en aérologie".

Au final je me demande bien quel message a voulu faire passer l'auteur ? A quoi cela sert-il ? 
Pourquoi ne pas simplement mettre en avant le talent des pilotes présents ce jour-là et informer du plaisir que l'auteur à eut à parcourir nos belles montagnes ? Car il y a aussi cela dans l'article.


2 commentaires:

Vincent Gimenez a dit…

Salut Sylvain. Et je te suis dans ta réflexion.

Le monde du parapente n'aura jamais fini de débattre sur ces questions. La météo générale, donnée par l'émagramme ou le windgram, l'interprétation des modèles stricto-sensu... Ici, on n'est pas en plaine. Peut-être des mini spots + des phénomènes de "micro-météo" sont ils l'exception qui confirme la règle et connus de quelques uns... Dans ce cas, on ne généralise pas et on garde ça confidentiel.

Pour moi, le problème, comme toute drogue, c'est l'addiction. J'ai été addict au parapente. Cela m'a valu un gros sketch. Et je ne suis pas le seul. J'adore voler. J'adore les 5 secondes avant et après un déco en montagne, j'adore combattre à l'entrée d'un thermique, l'arrondi final pour poser. C'est de l'adrénaline pure. Là est le problème : c'est boooon !!

Cette addiction prend le pas sur le bon sens et la retenue. La raison à de moins en moins sa place dans la décision...

Aujourd'hui, même si je pense à voler au moins une fois par heure, je ne suis plus addict. Je ne veux plus mettre ma vie (au sens propre comme au sens figuré) en hypothèque. 95 % des spots de vol libre sont connus avec leurs dangers objectifs : respectons ça et respectons ceux qui en on payé le prix, quel qu'il soit. Que leurs mésaventures servent au moins à quelque chose.

Et pourtant,même en appliquant cette règle, je me pète le radius en faisant du gonflage !!
A bon entendeur... ou pas.

Vincent (tu sais tu m'as ramené d'Arcizans à Isaby lors de la compet...)

Unknown a dit…

Bonjour,
avez-vous transmis votre réflexion à Parapente Mag ?
En lisant cet article, j'ai eu la même réaction que vous : cet article est écrit par un irresponsable, qui encourage les gens à faire n'importe quoi.
La rédac de Parapente Mag ne demande pas mieux que les lecteurs réagissent : je vous encourage vivement à leur transmettre vos pertinentes réflexions.
Amicalement,
Jacques Van Dyk - Belgique